Apparemment, c’est une idée qui est ancrée dans les gènes, et même si le mode de vie actuel est en train de faire changer les choses, cette conception est bien là et difficile à faire sortir de la tête de ces messieurs : « L’homme doit subvenir aux besoins de sa femme et la protéger ».
Aujourd’hui, n’en déplaise à la gent masculine, la femme est indépendante dans tous les sens du terme et n’a plus forcément besoin d’un homme pour être son modèle, son guide ou son soutien financier. Pourtant cet état de fait est bien réel et est même devenu le nouveau modèle de société. Malgré tout, les mentalités des hommes avancent moins vite que la société, et ils ont encore, pour la plupart, du mal à se résoudre à être désormais les égaux des femmes. Du coup, une femme qui s’assume, qui est capable de changer un robinet ou un pneu toute seule, qui n’a besoin de personne pour prendre des décisions importantes, ou qui a un revenu suffisant pour ne pas avoir à dépendre de qui que ce soit, eh bien, cette femme fait peur à l’homme, car, dans son schéma de pensée, il ne voit pas où pourrait être sa place dans une relation avec elle.
Cette façon de voir les choses a un nom : le syndrome du sauveur et c’est le sujet que nous traiterons dans cet article qui est peut-être, pour une fois, destiné autant aux femmes qu’aux hommes qui pourraient en être atteints et qui souhaiteraient changer.
1. Qu’est-ce que le syndrome du sauveur ?
Il ne faut pas nier que les femmes, aussi indépendantes soient-elles, aiment avoir un conjoint qui les rassurent et qui sont à leurs petits soins. Le syndrome du sauveur pourrait, à première vue, ressembler à ça, mais en fait il est beaucoup plus complexe. En effet, il induit une notion de dépendance qui complique énormément les relations. La personne atteinte de cette « maladie », souvent sans le savoir, a un besoin viscéral que l’autre soit sous sa dépendance. Paradoxalement, il met tout en œuvre pour le bien-être de l’autre, mais il n’est bien que s’il a le contrôle total.
Dans un couple, ce type de relation ne peut fonctionner que si le « protégé » est totalement d’accord avec ce principe de dépendance, affective et financière. Si tel n’est pas le cas, la relation n’aboutira à rien car le premier aura le sentiment que ces efforts ne sont pas considérés comme ils le devraient, et le second se sentira étouffé dans le couple.
Pourtant, pour les femmes dont l’homme est attentionné, toujours prêt à les aider, toujours vigilant à leur bien-être, c’est le bonheur, parce que même si elles sont indépendantes, il est toujours très plaisant de se sentir soutenue et de savoir que l’on peut compter sur quelqu’un en cas de besoin.
Par contre, si l’inverse n’est pas possible, parce que monsieur doit impérativement tout gérer et, en tant que mâle, doit être fort en toutes circonstances et ne jamais montrer ni émotions ni faiblesses, alors la femme aura un sentiment de frustration. C’est à ce moment-là qu’un déséquilibre se crée dans le couple et que l’incompréhension s’installe. Si dans ce cas, l’homme est atteint du syndrome du sauveur, il n’y aura malheureusement rien à faire, car dans sa conception du couple, c’est lui le dominant et il est inconcevable et même incompréhensible que sa compagne puisse lui être égale. Son âme de superhéros prendrait une claque telle qu’il ne saurait plus du tout où se positionner dans son schéma du couple.
C’est peut-être pour ça que les hommes « sauveurs » auront plutôt tendance à se tourner vers des femmes « à sauver ». Le scénario est souvent le même, cet homme, vu de l’extérieur ressemble à l’homme idéal, toujours là, toujours prêt à rendre service, toujours à l’écoute, toujours, toujours, toujours… C’est l’image même de l’homme de confiance, celui dont l’épaule est tellement large que l’on sait qu’on peut compter sur lui. Tant que la femme est en situation de dépendance, c’est le monde idéal pour les deux. Seulement, le revers de la médaille, c’est quand la femme commence à prendre son envol, à se sentir mieux au point de moins dépendre de son conjoint que ce soit affectivement ou financièrement parlant. Face à ce changement, le super héros de ces dames change, il devient jaloux, envieux et surtout désagréable. Dans son esprit, il n’est pas possible qu’il y ait deux « superhéros » dans la même maison, car ce serait le ramener à une position d’homme normal et non plus d’homme surpuissant.
Tout cela prouve une chose : l’homme dans son fonctionnement pathologique de « sauveur » n’est pas du tout tourné vers les autres, il n’est tourné que vers lui-même et vers l’importance qu’il croit avoir pour les autres ou tout simplement qu’il se donne.
2. Quelles en sont les raisons ?
Comme dans beaucoup de cas concernant ce genre de névroses, le syndrome du sauveur est souvent causé par un événement traumatique ayant eu lieu durant l’enfance.
Dans le cas d’un enfant vivant dans une famille dysfonctionnelle ou ayant dû prendre soin de ses parents et/ou de ses frères et sœurs, le syndrome du sauveur peut se manifester comme une forme de nouvelle identité. Suite à la gestion de cette situation familiale hors norme, l’individu peut avoir tendance à croire que l’amour va de pair avec le fait d’être indispensable dans la vie de son ou sa partenaire.
Mais, le plus souvent, ce syndrome apparaît après une humiliation très mal vécue. Le résultat en est un narcissisme exacerbé chez la personne ayant subi ce traumatisme. S’en sont trouvés décuplés les besoins d’être le centre d’intérêt, le besoin d’être admiré et le besoin d’être valorisé. Si ces besoins sont comblés, ils serviront de pansements, d’éléments de guérison, et plus il attirera l’admiration des autres, plus il aura le sentiment que sans lui rien ne peut fonctionner. C’est un cercle vicieux…
3. Quels sont les résultats ?
Comme nous l’avons vu plus haut, le « sauveur » est insoupçonnable. Il arrive tel un héros, vous aidant à sortir d’une ou de situations qui peuvent être complexes pour vous. Il fera tout pour vous, il sera là pour vous consoler, pour prendre le relais quand vous n’aurez pas le temps ou l’énergie de faire quelque chose, il fera les courses ou ira chercher les enfants à l’école, il paiera même quelques factures, en somme il sera parfait.
Seulement, une fois que vous aurez repris du poil de la bête, il réalisera que la femme qu’il a connue et soutenue jusque là n’est pas la vraie. Celle qui a retrouvé sa forme et son énergie s’avère être indépendante, elle est capable de se débrouiller toute seule. Cette nouvelle femme devrait le ravir, elle est maintenant pleine d’énergie et totalement libérée de ses soucis, elle pourra vivre pleinement sa vie de couple, elle pourra mettre au service de ce dernier cette capacité de faire. Les temps libres s’en trouveront augmentés et les moments à deux beaucoup plus agréables.
Mais c’est là que le « sauveur » se révèle. Ce qu’il aimait en vous, ce n’était pas la femme que vous êtes vraiment, c’était votre vulnérabilité à fleur de peau, votre besoin de lui, votre reconnaissance pour son aide, votre admiration, etc. Et le moment où vous pensiez qu’une vraie relation allait vraiment commencer, basée sur des rapports sains et non pollués par vos problèmes, c’est ce moment-là qu’il choisira pour changer, pour vous reprocher tout et rien, pour n’accordez aucune importance à ce que vous pouvez faire, en bref il devient quasiment le contraire de ce qu’il était quand vous vous êtes rencontrés. La raison en est simple, maintenant que vous allez bien, il s’est persuadé tout seul que vous n’aviez plus besoin de lui, et comme il est impossible pour lui de concevoir qu’une relation puisse aller dans les deux sens, du coup il rentre dans un processus de reproches dirigé uniquement sur vous, comme si vous l’aviez trompé sur qui vous étiez réellement.
4. Quelles sont les solutions ?
Si votre conjoint est un « sauveur », la chose primordiale à retenir, c’est que vous ne devez pas vous transformer en victime pour qu’il puisse jouer son rôle de héros. Au contraire, vous devez rester vous-même ! Il faut bien prendre conscience que c’est lui qui a un problème et non pas vous. Alors, pour prendre une décision il n’y aura que vous qui serez capable d’estimer s’il est possible de faire évoluer les choses ou pas. Si la réponse à cette interrogation est non, alors ne tergiversez pas, quittez-le. Dans le cas contraire, suggérez-lui une thérapie pour faire ressortir la raison profonde de ce comportement excessif. Ce sera à vous de lui faire comprendre que vous n’avez pas besoin d’être au fond du gouffre pour attendre de lui de l’attention, à vous de lui faire entendre que le couple c’est un échange d’égal à égal, et vous êtes aussi capable de le soutenir en cas de besoin, bref, à vous de l’accompagner dans sa démarche de changement, si tant est qu’il souhaite changer.
Si, par contre, votre parcours amoureux vous semble être une histoire sans fin, à tel point que vous finissez par penser que les hommes sont tous les mêmes, à double facette, le côté pile adorable pour vous séduire, le côté face distant et désagréable, c’est peut-être que vous êtes attirée toujours par le même style d’hommes, peut-être des « sauveurs ». Donc, pour les éviter, il faut sans doute que vous changiez deux trois petites choses chez vous. D’abord, présentez-vous d’emblée comme quelqu’un d’indépendant et de volontaire, et non plus comme un petit oiseau tombé de son nid. Ensuite, revoyez éventuellement votre conception du couple, abordez-le comme une complémentarité, une relation où chacun participe au bien-être de l’autre sans compter ou attendre quelque chose en retour. En faisant ce petit travail sur vous-même, vous éviterez de retomber sur le type d’hommes qui vous a déçu jusqu’à présent.